Bonjour,
Je parcours ce forum depuis des mois. Personnellement, mon seul problème avec l’alcool ne vient pas de moi… je vis avec un alcoolique, que j'aime de toutes mes forces.
C'est un mec bien, un gentil garçon, qui sait tout faire, qui sait prendre soin de ses enfants (nous sommes une famille recomposée) et des miens (des adultes, les miens, mais s'ils ont besoin de quelque chose, ils savent qu'ils n'ont qu'à le lui demander... quand il est sobre).
Quand je l'ai rencontré, j'ai tout de suite vu les stigmates d'une trop grande consommation (mon père est mort de son alcoolisme, je connais très bien cette maladie), mais il savait se modérer, à l'époque et j'ai surtout vu ses qualités... j'ai eu un coup de foudre, qui ne se dément pas, malgré tout. L'amour est là, depuis bientôt trois ans.
On s'est installés sous le même toit il y a maintenant deux ans. Tout allait bien, au début. Il ne s'alcoolisait vraiment que lors des fêtes, sinon il était tout à fait raisonnable... et puis, petit à petit, j'ai vu qu'il prenait l'apéro (cette saloperie de Pastis) tous les soirs, un, puis deux, puis trois, puis 1/2 litre par jour. Et ensuite, il a commencé aussi le midi, avant de repartir alcoolisé au boulot
Cela fait des mois maintenant qu'il n'est plus capable de tenir une promesse, de s'occuper du bricolage dans la maison, ou du jardin. Ça fait des mois aussi que, dès qu’il en a un coup, il en veut au monde entier (tout le monde y passe : famille, amis, enfants, institutions…)
Depuis quelques mois aussi, il est malade. Mal au ventre, tout le temps, manque d'énergie (tu m'étonnes !), manque de motivation, maux de tête, courbatures partout, mains froides... Il est plus souvent en arrêt de travail qu'au boulot. Il a fait quelques examens… Emphysème, stéatose hépatique, et j’en passe… Le médecin lui aurait, parait-il (parce que Monsieur ne veut pas que je l'accompagne, je suis donc obligée de le croire sur parole) parlé uniquement d'arrêter le tabac…
Mais bon, comme il a eu peur, il avait juré qu'il ne toucherait plus à cette saloperie... Il a tenu, allez, je ne sais même pas exactement, mais je dirais une semaine. Et il est instantanément redevenu l’homme que j’ai aimé au premier regard… j’y ai vraiment cru, cette fois ! Il retrouvait sourire et énergie, comme par magie… Il avait plein de projets pour lui, pour nous, pour tout !
C’était trop beau… la semaine dernière, en rentrant du boulot, je l'ai trouvé bizarre. J'ai bien entendu reconnu les signes, j'ai revu mon père quand il se cachait pour boire. En me fiant à mon odorat, j’ai trouvé une petite bouteille de son poison… Je lui en ai parlé... Il m'a regardée droit dans les yeux et m'a juré qu'il n'avait bu qu'une bière, et qu'il se sentait déjà honteux... Je n'en ai pas rajouté, ça ne sert à rien de discuter avec quelqu'un qui est alcoolisé. Mais il m’a menti, en me regardant droit dans les yeux…
Samedi, en faisant un peu le tour de la maison, j'ai vu qu'il avait aussi bu des petites mignonnettes d'alcool fort que ma fille avait rapportées d'un voyage, et la bouteille de rhum ambré qui me sert pour la pâtisserie... je n'ai rien dit, encore, parce qu'il n'était toujours pas à jeun...
Le reste du weekend, comme j’étais avec lui, il a été à peu près raisonnable… il s’est contenté de quelques bières (qui n’ont pas du tout le même effet sur lui que cette saloperie de Pastis).
Et voilà qu’hier midi, en rentrant du travail, je l’ai trouvé assis dans le canapé, devant un verre de bière. Lorsque je lui ai fait remarquer qu’il était tôt pour boire qu’il se mettait en danger, il m’a encore menti en me disant que c’était un petit fond qu’il restait d’une fête que son fils avait organisée samedi. En fait, il restait deux bouteilles de bière assez forte… et elles s’étaient bizarrement vidées sur la matinée de lundi !
Et hier soir, quand je suis rentrée après ma journée, il était encore dans le canapé, devant un verre d’anisé sans alcool (paraît-il). J’ai vu de suite qu’il n’était pas net. Il m’a dit qu’il avait fait quelques courses, et il a commencé à critiquer tout le monde. Ça sentait le Pastis à plein nez (oui oui, l’odeur est bien reconnaissable, différente du sans alcool). Je lui ai demandé combien il en a bu, il n’a pas répondu. J’ai insisté et lui ai redemandé de me dire ce qui n’allait pas, pourquoi il n’arrivait pas à tenir plus de quelques jours… et il m’a juste répondu que ce n’était pas ça qui le mettait de mauvaise humeur, que lui aussi a le droit d’avoir des états d’âme, et que désormais, il fermerait sa gueule et m’obéirait pour me faire plaisir…
On a mangé et je suis montée me coucher, tellement fatiguée de lutter contre SON alcoolisme, je n’ai plus le courage de rien, surtout pas de discuter et d’entendre ses réponses à la con à mes questions sérieuses !
Il est venu dans la chambre à 1 heure du mat, complètement déchiré. Je ne dormais pas (je ne dors plus que d’un œil, depuis qu’il a des gros symptômes physiques). Il s’est couché et s’est relevé presque aussitôt pour aller vomir. En revenant, il est tombé. J’ai allumé la lumière et je l’ai vu, assis par terre en train de jurer. Il s’est relevé tant bien que mal (hors de question que je l’aide, il s’est mis tout seul dans cette situation !) et s’est recouché pour se relever dix minutes plus tard pour sa deuxième gerbe.
J’ai fini par aller dormir dans le canapé. Dormir étant un bien grand mot, puisque j’ai pas trouvé le sommeil avant quatre heures du mat (alors que le réveil devait sonner à 5h30)…
Je suis fatiguée… j’ai tout essayé, depuis des mois : la douceur, le soutien (je ne suis pas alcoolique, j’aime bien boire mon coup, mais je vais jusque refuser les verres qu’on m’offre pour le soutenir), la colère, l’argument de ses enfants qui sont encore jeunes pour être orphelins, celui de sa santé et des souffrances induites pas les maladies alcooliques (il doit encore faire quelques examens…), lui montrer que ça me rend malheureuse, le lui cacher aussi, lui faire la gueule, le déculpabiliser… rien n’y fait.
Je ne sais plus. Je n’imagine pas ma vie sans lui, mais ce n’est plus l’homme que j’ai rencontré il y a trois ans. Je l’ai, il s’est, déjà perdu. Si je n’ai aucune chance de le retrouver, autant m’en aller tout de suite, ça m’évitera des jours et des mois de souffrances inutiles… Et en même temps, je vois encore, là, tout au fond, une lueur d’espoir. Il se sent honteux à chaque fois. Je sais que tout à l’heure, quand je vais rentrer du boulot, il sera à l’eau (sans jaune dedans), qu’il me dira qu’il va encore essayer… et je sais qu’au premier stress venu, il courra s’acheter une nouvelle bouteille de sa saloperie…
Il a besoin d’une aide extérieure, d’un regard professionnel… mais comment le lui faire accepter ? Je ne sais plus quoi faire. La seule chose dont je suis sûre, c’est que j’en suis folle et que ça me rend malade de le voir se suicider (socialement, professionnellement, amicalement, sentimentalement et physiquement) à petit feu…
Voilà, c’est mon histoire, pas bien différente des vôtres, mais ça fait du bien de poser des mots sur cette souffrance… ça aide à y voir plus clair ! Merci de m’avoir lue, désolée pour le pavé !