Bonjour,
Je tiens à raconter mon histoire aujourd'hui car je me dis que cela aidera peut-être les proches de personnes dépendantes à l'alcool.
J'étais en couple avec mon concubin depuis 5 ans quand l'alcool s'est invitée dans notre relation. Mon compagnon a fait une dépression sévère avec de crises d'angoisses suite au décès tragique de son frère. Ce qui a également réveillé des douleurs et drames familiaux enfouis.
Je l'ai accompagné dans ses démarches de soin afin qu'il soit soigné et suivi par des professionnels. Travaillant dans le médical de nuit, je n'avais pas encore remarqué son addiction à l'alcool même si je lui avais déconseillé de boire la moindre goutte d'alcool en raison de son fort traitement pour la
dépression. Il en consommait malgré tout lors d'événements sociaux. Voyant que son état psychique ne changeait pas, j'ai changé mes horaires de travail et suis repassée en roulement de jour afin de mieux l'aider et le soutenir.
C'est à ce moment la que j'ai pu voir son addiction à l'alcool. Au début c'était des bières fortes uniquement dans de grandes quantités et toujours en
mon absence. Puis l'alcool fort qu'il y avait dans la maison. Tout y passait.
D'autres invités (non invités) se sont alors incrustés dans nos vies : mensonge, manipulation, manque d'hygiène, manque d'implication dans le quotidien, incapacité à travailler, comportement dangereux, tentatives de suicide, agressivité, chantage affectif etc...
Je continuais de le soutenir notamment en veillant à ce qu'il soit suivi par un psychiatre, une psychologue, le CSAPA de notre ville, les Alcooliques Anonymes (avec un parrain), Vigilans.. Sans grand succès. Il y avait des moments
où il pouvait ne pas boire surtout si j'étais présente, mais ils étaient court.
Il a été hospitalisé en clinique psychiatrique 3 fois.
La 1ère fois se fut pour la dépression. Il y est resté 4 mois. Temps pendant lequel il n'a pas bu et tout se passait bien. Il a rechuté 5 jours après sa sortie de
clinique. Son alcoolisme s'est alors intensifié avec la consommation de bières fortes et de vodka. Et se fut la dégringolade: une tentative de suicide avec
son traitement et de l'alcool. Il a su rebondir et a essayé de vaincre son addiction en utilisant tous les outils mis en place. Son suivi a été renforcé par le
passage d'infirmiers à domicile pour la surveillance du traitement et comme soutien surtout en mon absence. Mais cela n'y a rien fait et rechute après
un mois d'abstinence avec une nouvelle intensification de sa consommation et cela même en ma présence.
Voyant les très grandes quantités d'alcool prises en
une semaine et l'apparition d'agressivité de sa part, une 2ème hospitalisation en clinique est faite pour son alcoolisme. Il y restera 7 semaines et rechutera
le jour même de sa sortie. Suite à cette hospitalisation j'ai appris qu'il était
alcoolique depuis 25 ans. Et que le décès de son frère a intensifié son alcoolisme qui était psychique puis est devenu psychique et physique.
Je me retrouve alors épuisée et démunie face à tout cela. Je prend conscience (même si je le savais) après 4 ans à me battre avec compagnon contre la
maladie que lui seul a les clés en main pour s'en sortir. Sans volonté de sa part combiné avec les aides mises en place, il n'y a pas de soin possible.
Car l'alcoolisme se soigne mais ne se guérit pas. Et nous sommes spectateurs de la noyade de notre proche a qui nous avons lancé une bouée qu'il ne
saisit pas pour se sauver.
Me sentant complément perdue et seule face à la situation, sur les conseils d'une amie, je décide de consulter une psychologue qui sera d'une très
grande aide et soutien. Marre d'être stressé, d'avoir sans cesse une boule au ventre en rentrant du boulot avec mille questions en-tête ne sachant pas dans quel état je le retrouverai. Je me rend compte que je me suis oubliée, que je ne sors plus, ne vois plus mes amies et ma famille, ne fais plus mes loisirs. Je travaille et je m'occupe de lui uniquement. Nos familles sont au courant de la situation. Ma famille le soutien et l'encourage à fond dans ses soins . La sienne fait l'autruche car
elle sait que sa souffrance vient d'eux (alcooliques aussi).
Après une énième humiliation de sa part, le cœur brisé, je décide de me séparer de mon compagnon qui ne décroche pas de l'alcool et s'y enfonce toujours plus. Son psychiatre me viendra en aide et le fera hospitaliser une 3ème fois.
Je me sentais soulagée, plus de boule au ventre et stress. J'entrevoyais une nouvelle vie, à être celle que j'ai toujours été et surtout sans l'alcool et ses
ravages. Cette horrible peur de le retrouver mort quand je rentre du boulot s'en était allée.
Nos organisons notre séparation pendant cette hospitalisation et je continue de le soutenir. Apres un mois en clinique et ayant trouvé un nouvel appartement, il rechutera le jour même de sa sortie. Ne me donnera peu de nouvelles. Après deux jours de silence de sa part, avec un ami et sa sœur, nous donnerons l'alerte aux secours. Il sera malheureusement retrouvé mort dans son nouvel
appartement. Mort intoxiqué par l'alcool...
Nous vivons dans une société où l'on pense à tort que l'alcool c'est chouette, c'est festif. Que si l'on ne boit pas, on est ennuyeux. On oublie que l'alcool est une drogue qui tue. Un mal qui rend très malade et appelle même bien souvent d'autres maladies.
C'est une maladie complexe qui même si elle se soigne, ne guérit jamais et est un combat de tous les jours pour les personnes qui en souffrent et créée des dommages collatéraux sur les proches.
Aujourd'hui, je suis en deuil à cause de l'alcool et dois apprendre à vivre sans la personne que j'aimais le plus au monde depuis près de 10 ans. Je ne culpabilise pas de notre séparation avant sa mort car je lui ai apporté toute l'aide et le soutien dont il avait besoin et je pense qu'avec le temps, c'est ma famille qui aurait dû m'enterrer également, avec lui.
J'espère que mon histoire fera prendre conscience aux personnes qui la lise, l'impact que l'alcool peut avoir sur des vies. Peut-être permettra t elle de faire
prendre conscience aux personnes dépendantes, quel mal représente l' alcool. Je sais que cela n'est pas simple et que le malade doit avoir envie de se
soigner et se battre avec ses "démons "pour y parvenir.
Courage à tous et toutes.
Orchidee8