Bonjour,
Comme de nombreuses personnes ici mon conjoint a une consommation excessive d'alcool. Et même si aujourd'hui on fait maisons séparées, j'avais envie de témoigner sur le fait que j'ai attendu trop longtemps pour prendre cette décision. Aujourd'hui le mal est fait et rien ne sera jamais plus pareil.
D'abord parce que sous alcool, ses mots sont d'une violence inouïe. Et les mots, ça reste. Ils ont beau s'excuser le lendemain, dire que leurs paroles ont dépassé leur pensée, qu'ils ne se souviennent plus, le mal est fait. Comme on dit, quand on froisse une feuille, on peut essayer de l'aplatir autant qu'on veut, elle gardera toujours la trace de ses pliures.
Ensuite parce que toutes ces horreurs entendues, à force, au bout de tant d'années, nous font perdre confiance en nous. C'est facile d'accuser sa femme d'être la cause de son alcoolisme. Surtout quand le dit alcoolisme a commencé avant votre rencontre... mais à force de l'entendre, on finit par se dire que c'est peut-être vrai.
Et puis l'alcoolique est dans le déni, alors il cherche un fautif. Du coup, il est prêt à raconter n'importe quoi à n'importe qui pour se faire passer pour la victime. Moi, il me fait passer pour une démone. Alors que mon seul crime a toujours été de l'aimer, et de vouloir l'aider. Mais on dirait qu'il est incapable de discerner le bien du mal. Il s'accroche aux gens toxiques et humilie les gens qui essaient de l'aider. Moi qui suis une personne gentille, je sais qu'aujourd'hui plein de gens (notamment sa famille) me prennent pour une ordure à cause des mensonges qu'il a racontés, et c'est super difficile à accepter. L'estime de soi en prend un coup.
La rage et la colère envers sa consommation d'alcool, mais surtout la rage et la colère d'avoir accepté la situation. Après toutes ces années, je me rends compte que rester auprès de lui ne l'a absolument pas aidé. Lui trouver des excuses est probablement la pire chose à faire.
Il y a aussi la confiance. Si on venait à rompre, je n'arrive pas à me projeter avec quelqu'un d'autre. Je me dis qu'il a bousillé mon capital confiance. Comment faire confiance à nouveau après avoir vécu tout ça ?
La culpabilité de l'abandonner à son sort. La culpabilité de rebondir alors que lui ne s'en sort pas.
Mais de tous les arguments, le plus importants est celui des enfants. Même quand ils sont petits, ils savent. Ils se rendent compte. Ils entendent des violences verbales qu'ils ne devraient pas entendre. Ils perdent une partie de leur innocence. Ils ont des pensées qu'ils ne devraient pas avoir à leur âge.
Peut-être qu'il existe des dépendants qui s'en sortent, et je l'espère de tout mon cœur. Mais il est primordial de vous faire passer en priorité. Le mien n'a jamais eu de déclic, et pourtant c'est allé très loin. Très très loin. Aucun déclic, et il est toujours persuadé que tout est ma faute.
Au moment où je vous parle, ça fait 6 heures qu'il me harcèle de messages haineux. C'est comme ça tous les week-ends, surtout depuis que je suis partie. Mon seul répit est de pouvoir faire l'autruche en éteignant le téléphone, mais je sais qu'en le rallumant la réalité va me rattraper. Le sachant, le répit n'est que de courte durée. J'ai du mal à profiter tranquillement des enfants sachant qu'il est en train de m'insulter de tous les noms de la Terre à l'autre bout de la ville.
Mon tort, ma plus grosse erreur, ça a été de lui pardonner son comportement et d'espérer si longtemps qu'il guérisse. En fait, c'est comme si en lui pardonnant je l'avais autorisé à recommencer. Je m'en veux beaucoup pour cela.
Alors je sais que c'est plus facile à dire qu'à faire, j'ai été à votre place, je comprends votre hésitation.. mais s'il vous plaît, partez dès que possible. Vous ne pourrez pas le sauver si lui-même ne le veut pas. On a toutes eu cet espoir, seulement ça marche pas. En revanche, vous pouvez vous sauvez, VOUS et vos enfants.