Journal de liberté

Ce message, personne ne le lira, mis à part les dévoués modérateurs de ce forum. Pourtant, je voudrais en faire un manifeste. Un panneau 4x3. Un message de sécurité qui se déclencherait à l'ouverture de chaque bouteille. Un message que je voudrais adresser aux mômes. A tout ces petits veinards et veinardes pour lequel l'alcool rime encore avec "fête" et "plaisir".
J'ai 56 ans, les mômes. J'ai eu, et j'ai encore une vie formidable. J'ai rencontré la femme de ma vie. Elle dort à côté de moi. J'ai failli la perdre, mais j'ai réussi à sauver ce truc là, cette partie-là de ma vie. J'ai pas tout sauvé. Mais ça j'ai réussi.
Je ne vais pas vous saouler (ha ha, qu'il est drôle ce Rewinder) avec ce que j'ai vécu. Il vous suffit de lire les posts de ce forum pour ça. Mais j'ai juste envie de vous dire un truc : ARRETEZ TANT QU'IL EST ENCORE TEMPS.Arrêtez tant que l'alcool est encore un truc que vous ne cotoyez qu'exceptionnellement. Un truc de fête, un truc que vous associez avec "amis", "joie", et "bonheur".
Parce qu'après, vous ne l'associerez plus jamais avec ces mots là. Après, vous l'associerez avec "chaine", "prison" et "solitude". Et ça va super vite, en plus.
Soyez forts. Soyez libres. Soyez fiers.
Soyez sobres.

Salut Stefane, heureux de voir que j'ai donc au moins 3 lecteurs : le modérateur, Davidoff31 et toi ! Stephen King, mon gars, fait gaffe, je suis dans ton rétroviseur... Ca fait du bien d'être con. Y'a un homme très intelligent, terriblement doué et encore plus alcoolique que toi et moi, Serge Gainsbourg, qui disait "la connerie, c'est la décontraction de l'intelligence". Dans un monde où l'on exige toujours plus de nous, sur tous les fronts, se décontracter est un soin. Voilà tiens, je vais écrire un bouquin : "La connerie, le yoga de l'esprit". Maintenant que je sais que j'ai au moins trois lecteurs, je devrais trouver un éditeur facile !
Je vais quand même être sérieux aussi, sinon nos modérateurs/trices vont nous dire « Bon, les gars, ici c'est Alcool Infos Services, pas Rires & Chansons" (quoi que je me demandes si, de temps à autre, lire des conneries ne les soulagent pas un peu de tout les choses terribles qu'ils/elles lisent dans les messages qui arrivent sur ce forum. Y'a pas de raison qu'ils n'aient pas aussi le droit à la décontraction).
Donc, la partie sérieuse. Elle porte sur deux choses. la première, c'est une réponse à ton interrogation : "est-ce que je me suis déja rendu trop loin ?" Je te ferais deux réponses : la première c'est que je pense qu'on a chacun sa réponse à cette question. J'ai longtemps fait comme toi, ne boire qu'en fin de journée. Mais quand j'ai réalisé que je ne pouvais pas me passer de mon alcoolisation de fin de soirée, alors j'ai commencé à m'inquiéter. Parce que j'aime bien être libre. J'ai 56 balais, je crois que je me bastonne depuis 56 balais et 9 mois pour qu'on ne vienne pas limiter ma liberté de faire qu'est-ce que je veux quand je veux. Et l'alcool, en étant devenu une dépendance, limite ma liberté. Ca c'est le point un.
Le point deux c'est que : jamais rien n'est définitif, ni dans un sens ni dans l'autre. Si tu as lu ce journal, commencé il y a presque un an, tu sais que j'ai eu des périodes de victoire, et d'autres de défaites. Et je sais maintenant que le reste de ma vie sera comme ça. Des périodes de sobriété (elles ont une sympathique tendance à se rallonger) et des périodes de reprises (elles ont aussi une sympathique tendance à se réduire). C'est pour cela que j'ai écrit ce "message pour les heureux veinards qui ont encore l'alcool heureux". Pour leur dire de faire gaffe, avant de s'engager dans un combat qui n'aura jamais de fin (d'ailleurs j'ai déjà prévu de me détruire la tronche au whisky-coca le jour de mon enterrement, c'est pour te dire - eh, j'ai été sérieux pendant 2 paragraphes, là c'est la mi-temps, steuplait, modérateur/trice !)
Deuxième chose sur laquelle je voulais revenir dans ton message : le rôle de l'entourage. Il y a un jugement moral sur l'alcoolisme, qui est presque aussi nocif pour nous que ne le sont ces foutues substances. Je vais faire mon vieux con de punk de base : ces gens jugent notre alcoolisme scandaleux parce qu'il les renvoie à leur crainte de leurs propres fragilités. On boit pas parce qu'on est mauvais, déficient, faibles. On boit à cause d'une histoire, à cause d'une faille qui un jour, s'est ouverte en nous. A cause d'une pression, d'une sorte de presse hydraulique quelqu'onque, d'un truc qu'on devait absolument faire et qu'on ne pouvait pas faire sans en ressortir avec une félure. Ce n'est pas un défaut de fabrication (d'ailleurs on n'est pas des foutues machines, non ?) c'est un truc qui nous est arrivé. On a répondu comme ça. C'était une mauvaise réponse, OK. Il y a des gens qui répondent à leur fragilités en bouffant trop. En se gavant de tranquillisants. En s'abrutissant devant les chaines d'infos en continu. La liste des moyens de combler les trous qu'on a dans nos âmes est très longue.
Et, Stéfane, toi que je ne connais que si peut, je vais oser te donner une autre réponse à cette question de l'entourage : tu t'en fous, de ton entourage. La baston, c'est toi qui la mène, les coups, c’est toi qui les prends. Pas eux. Les tripes en vrac, les gueules de bois, le sentiment de détestation de soi-même, c’est toi qui te bat avec. Ils n’ont rien à dire. Ceux qui t’aiment prendront le train, comme disait Patrice Chéreau
Bien sur, si tu bat ta femme ou ton mec ou des enfants ou ton collègue de bureau ou même ton hamster quand t’es bourré, alors t’es juste un gros con et tu dois t’arrêter de suite. Et je ne dis pas non plus que la vie des conjoint(e)s d’alcoolique est un doux paradis. Mais ne t’occupes pas du regard des autres, mon frère en quête de sobriété. Jauges-toi à l’aune de tes résultats de chaque jour. T’as merdé, j’ai merdé, on a tous merdé ici (enfin, j’espère que nos modérateurs/trices sont sobres, quand même (eh, c’est la fin de la deuxième période, j’ai le droit de redevenir con SI JE VEUX))

Tchao et bises à tout ceux qui partagent ce combat.

Salut à tous le monde. Liv, je vais répondre à ta question, mais d'abord je voudrais donner quelques nouvelles, cela fais presque deux ans que je n'ai pas écrit ici. et il s'est passé plein de chose en deux ans, du pas glop et du glop. Tout d'abord, je suis actuellement sobre depuis 233 jours. Je n'ai plus la moindre envie de boire, je fréquente des gens qui boivent, je fais des concerts dans des bars ou des restos, avec des gens qui boivent autour de moi, et moi je reste peinard au perrier citron.
En fait, depuis 2021, je suis passé d'une tentative de sevrage a une autre : sept en tout. Le 23 octobre 2022, lendemain d'une fête chez des copains, je me réveille en catastrophe à 7h30, m'apercevant que j'avais une fois de plus oublié d'écrire un article que je devais livré ce jour-là à 9h pétantes. Probléme habituel : mes mains tremblent trop. Donc je me sers coup sur coup 2 whisky coca bien chargés. J'écris mon article, je l'envoie à la rédaction. Puis je me dirige vers un petit escalier, et là, je trébuche et je tombe la tête la premiere sur la corniére d'un meuble. Je perds connaissance quelques minutes, le pote chez qui j'étais s'affole du fait de ma tête qui pisse le sang. Il appelle les pompiers, qui viennent, me sécurisent, constatent que je n'ai pas de trauma cranien apparemment. Le chef du binome de pompiers me demande pourquoi je suis tombé. J'ai vu défiler les deux options possibles : soit mentir et dire que j'avais trébuché, soit appeler un alcoolisme un alcoolisme et lui parler des 2 SkyCoca de 7h30. J'ai choisi cette option. Direction les urgences, examen pour ma p'tite tête, heureusement trop dure. Un entretien avec une psy tres compétente. Je lui dit que j'ai déjà essayé sept fois de me sevrer, que je ne tiens pas, et que maintenant j'ai décidé d'aller en cure. Je voulais aller en HP, elle me conseille plutôt une clinique, je ne peux pas en dire le nom car ça ne colle pas avec les régles de ce forum. Je m'y interne volontairement le 23 novembre 2022, j'en sors le 4 janvier 2023. Je raconterais peut-être plus tard cette clinique, si il y en a que ça intéresse. Pour moi, ca a été le bon outil. Depuis, je reconstruit ce que j'ai foutu en l'air. Dans quelques semaines, je vais cesser de squatter chez des copains à droite à gauche pour reprendre un petit studio. Je suis solo, je me fais de nouveaux amis, a qui j'ai dit les choses. Chaque jour est une victoire, même si maintenant c'est une appli sur mon téléphone qui compte les jours. Je me sens libre de l'alcool comme j'ai été libre du tabac en 2002. Pour autant, j'ai toujours la trouille de replonger, et je ne peux pas m'empe^cher de rester en vigilance. Il n'y a plus de petite voix pour me roucouler "bois un coup", mais cette petite coquine s'est peut-être juste planquée dans un fourré, et pourrait bien revenir à un moment ou à un autre.